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Petite Bulle Littéraire

12 octobre 2009

Le Citron

Kajii MOTOJIRO, Le Citron (éd. Philippe Picquier)

arton21"Pour tout dire, j'aime les citrons. J'aime leur couleur pure, comme celle de la peinture lemon yellow durcie, sortie de son tube, j'aime leur forme fuselée, et leur taille ramassée. - Finalement, je décidai d'en acheter, un seul." p. 30

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12 octobre 2009

L'Annulaire

Extraits de L'Annulaire de Yoko OGAWA

9782742756285"Soudain, je me suis aperçue que du sang avait giclé jusque dans la cuve où il colorait la limonade en rose. Sa couleur claire pétillait avec les bulles." p. 11

"La seule chose qui m'a fait souffrir, c'est le fait que je me demandais où était passé le morceau de chair arraché à mon doigt. L'image qu'il m'en restait était celle d'un petit bivalve rose comme une fleur de cerisier, souple comme un fruit mûr. Il tombait au ralenti dans la limonade et restait au fond, tremblotant avec les bulles." p. 12

"[c'était] mon annulaire de la main gauche qui se trouvait au bout de son regard." p. 24

(parlant d'une partition de musique) "Je ne voyais sur la portée que des signes en forme de tourbillon et des notes qui semblaient avoir des ailes d'ange." p.28

"la même phrase se répétait jusqu'à donner sommeil." p. 41

"Ensuite nous nous sommes aimés au fond de la baignoire." p. 46

"sur le bureau, le chocolat des cacahuètes était complètement ramolli." p. 59

7 octobre 2009

Vivre à quoi ça sert ?

Extraits du livre de Soeur Emmanuelle, Vivre à quoi ça sert ? éd. Flammarion

32569_2652585"Mes contemporains sont poursuivis par le non-sens. Chercheurs souvent désespérés, la vie semble à leurs yeux une succession chaotique d'instants et d'événements. Or les événements - aussi bien ceux de notre histoire personnelle que ceux de l'histoire de l'humanité - ne valent que par leur sens. En soi, un événement, ce qui nous arrive, n'a pas de sens. A travers l'événment, on doit pouvoir discerner, juger, entre ce qu'il comporte de tragique et ce qu'il porte de grâce et de fécondité. On doit pouvoir le relativiser. Le sens, c'est faire l'expérience que, à travers et au-delà du tragique, du merveilleux ou du banal apparents, il y a autre chose. [...] Ce dont la plupart des hommes et les femmes d'aujourd'hui ont besoin, c'est de donner du sens à leur existence." p. 7-8

"Qu'ai-je donc à proposer, moi, une vieille religieuse de quatre-vingt-quinze ans ? Oh, rien que j'aie inventé toute seule ! Je voudrais rencontrer dans ce livre la chance que j'aie eue très tôt : j'ai rencontré un penseur de génie. Depuis mon adolescence, Blaise PAscal est mon maître à penser, et donc mon maître de vie. Si ses Pensées sont devenues mon livre de chevet, c'est parce que, à leur lecture, j'ai trouvé la clef m'ouvrant au présent. Au scalpel de ses Pensées, il a tranché dans le vif et mis au jour le tréfonds le plus humain de mon être, enfoui sous la couche d'un passé mort. Nous sommes tous rivés à un amas de souvenirs, d'heurs et malheurs passés, qui pèsent et nous entravent. Le scalpel a ceci en propre : il tranche et ouvre, découvre." p. 11-12

"Le propos de ce livre est de faire connaitre àmes contemporains en quête de libération un chemin de paix, un chemin de joie : la pensée de Blaise Pascal. Celle-ci consiste essentiellement dans la distinction et l'articulation entre trois "ordres. L'ordre de la matière, l'ordre de l'esprit t l'ordre de l'amour sont trois modes d'existence, trois façons pour l'homme de se situer par rapport au monde, à Dieu et à lui-même. Au terme du parcours, j'espère avoir montré que le sens de la vie ne se trouve ni dans l'ordre de la matière ni dans celui de l'esprit, tous deux par ailleurs considérables et nécessaires, mais seulement dans le troisième, l'ordre du coeur. Pour emprunter ce chemin, il nous faut comme Pascal partir du manque, de la faiblesse ontologique de l'homme et de son angoisse. Il ne s'agit pas cependant d'y rester vautré ou de s'y complaire. A la différence des philosophes qui s'y enlisent, Pascal, lui, affronte le problème pour y résoudre. Fondamentalement, si j'écris ce livre, c'est pour faire partager la libération qu'apporte la pensée de Pascal, pour proposer un chemin de sens." p. 14

"L'homme n'est qu'un roseau, le plus faibe de la nature. Tiens, voilà quelqu'un qui veut dire quelque chose! Quoi de plus faibe en effet qu'un roseau : le moindre vent e courbe. C'est l'homme, c'est moi. [...] comme je suis fragile ! J'enrage parfois. Impuissante à me contrôler comme à persévérer dans l'effort, un rien me décourage [...] L'homme n'est qu'un roseau, le plus faible de la nature, mais c'est un roseau pensant. Ca m'a fait un choc. L'homme est faible, oui, mais il pense. Un éclair jaillit soudain devant mes yeux : ce chat, lui, ne pense pas ! Queque chose se met à bouillonner en moi. Je ne suis pas une bête, mais un être humain. Je ne suis pas une bête, mais un être humain. Je respire par le corps, oui, comme le chat, mais je suis un être pensant. Je prends conscience que je pense." p. 23

"Il ne faut pas que l'univers s'arme pour l'écraser : une vapeur, une goutte d'eau, suffit pour le tuer. Mais, quand l'univers l'écraserait, l'homme serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu'il sait qu'il meurt et que l'avantage que l'univers a sur lui, l'univers n'en sait rien. Comment ! ce pauvre petit roseau que je suis, comparé à l'immensité de l'univers, possède, malgré lui et dans son étroitesse, une valeuret une noblesse incommensurables. On aurait dit que je buvais du vin de plus en plus enivrant. La vie qui m'avait paru tellement bête prenait un sens [...]. OUI, je voulais vivre. Vivre pour développer mon être pensant qui dépasse les bornes de l'univers. [...] je pressentais que l'homme, dans sa faiblesse, peut devenir maître de cet universqui, si facilement, l'écrase. Ah, quelle évasion ! Je termine la lecture du même fragment. Toute notre dignité consiste donc en la pensée [...]. Travaillons donc à bien penser : voilà le principe de la morale. Où Pascal veut-il nous conduire ? Il part d'un roseau pour aboutir à une morale ! Brr... quel mot froid et rebutant ! une douche glacée tombe sur mon enthousiasme exalté. [...] A l'instant où quoi que ce soit m'était défendu, j'éprouvais une envie irrésistible de m'y précipiter. Ca donne du sel, ça pique la langue, c'est excitant, tandis que tout ce qui est vertueux est assommant. On a qu'une vie, il faut en cueillir tous les fruits." p. 24

"Dans mon milieu, personne ne comprenait mon mal-être, mon questionnement, le tunnel où je me sentais prisonnière, mon perpétuel esprit de contradiction. Tout allait bien autour de moi, nous avions une bonne petite vie facile. Pourquoi faisais-je tant de difficultés et pourquoi étais-je toujours mécontente ? Pour ma part, à la lecture de Pascal, j'avais enfin l'impression de courir sur une route ouverte. Enfin quelque chose ! Si la morale reposait non sur des règles dictées, mais sur le principe du bien-penser qui est nécessairement libre, alors elle ne pouvait être que libératrice et joyause. Ainsi, la vraie morale se moque de la morale." p. 26-27

"Pour Pascal, la matière, c'est tout simplement ce qui n'est pas "esprit". p. 29

"Disproportion de l'homme ; [...] Car enfin, qu'est-ce que l'homme dans la nature ? Un néant à l'égard de l'infini, un tout à l'égard du néant, un milieu entre rien et tout [...] également incapable de voir le néant d'où il est tiré, et l'infini où il est englouti [...] dans un désespoir éternel de connaitre ni leur pricincipe, ni leur fin. [...] Entendons bien : même quand il est question de "l'ordre de la matière", c'est encore d'une activité de la pensée dont nous parlons, lorsqu'elle appréhende le monde. Si la matière, elle, ne pense pas, l'homme, lui, a cette faculté de la penser. C'est lui qui pense et se représente le monde, c'est lui qui a conscience à la fois des deux infinis et d'être écartelé en leur milieu, c'est lui qui connait que la connaissance et la maîtrise de la matière lui échappent." p.31

"Franchissons enfin un dernier pas. La condition matérielle de l'homme, son animalité, sa corporéité impliquent aussi qu'il doit mourir. Le dernier acte est sanglant, quelque belle que soit la comédie et tout le reste : on jette enfin de la terre sur la tête, et en voilà pour jamais. [...] "L'homme est le seul animal qui sache qu'il doive mourir", a écrit André Malraux. Or, face à cela, deux réactions opposées se manifestent souvent : le déni de la mort et le culte de la mort." p. 42

"Prenons au sérieux nos pulsions morbides : la mort va jusqu'à fasciner, le suicide vient parfois nous tenter. Pour ceux qui en jouissent, la vie paraît belle. Mais pour ceux qui en pâtissent, elle semble funeste. Pour tous elle est chaotique, roue qui tourne, nous pousse un jour au sommet, à l'abjection le lendemain, avec une implacable égalité. Roi ou mendiant, l'épilogue est le même : un cadavre descend dans la terre. Pour en finir là, à quoi ça sert de vivre ? Ne sommes-nous pas en pleine comédie ? Un soir d emon adolescence, écoeurée de tout, j'ouvre la fenêtre de ma chambre à coucher. Elle était au deuxième étage. Je me vois encore me pencher sur la rue. Sauter, et... finita la commedia ! Qu'est-ce qui m'a arrêtée ce jour-là ? Le roseau pensant ? L'homme, être misérable mais grand par la pensée ? Ou plutôt la peur frissonnante de mourir écrasée sur le trottoir, pire, de vivre les membres disoqués ? J'ai refermé la fenêtre et ne l'ai plus jamais ouverte dans les mêmes dispositions. Comme je me sens, dès lors, en communion avec ceux qui, sous un ciel plombé, sur une terre hostile, sont hypnotisés par le saut final dans la tombe ! D'où vient cet écoeurement, ce mal-être qui se loge aussi bien dans la tête, dans la sensibilité, dans les tripes et qui emplit notre bouche de nausée ? Que d'expressions de désespoir ai-je entendues, cris qui se répercutent en echo et qui font mal, surtout quand on a passé par là ! Le pire est qu'on se sent emprisonné dans un mouroir sans pouvoir en trouver l'issue, ni la cause. On ne voit partout que corruption, injustice, odeur de mort. L'amour ? un mensonge vide de sens. La haine habite la planète, et jusque dans mon propre coeur ! Certains se sentent maudits, maudits des hommes, maudits de Dieu, s'il existe [...]. Pourquoi en arrive-t-on là, à en être obnubilé par la seule face ténébreuse de la condition humaine ? Qu'est-ce qui manque pour que tout soit insupportable et insensé, tellement bête et vide ? Il faut tout de même un intérêt pour vivre. Car nous les portons en nous-mêmes, et non en dehors, ces forces vives. Mais elles nous mangent de l'intérieur si elles ne trouvent pas à s'exprimer. Le néant, c'est l'absence de terrain où puisse s'investir la soif d'être, de vivre et d'être soi. Quand l'élan de la vie tourne à vide, alors on s'accroche à des solutions provisoires, à des riens,le look, la situation sociale. On tente de vivre seulement pour vivre, on reflue dans le seul ordre de la matière. Mais certains font très tôt l'expérience, que d'autres feront très tard, ou peut-être jamais, qu'on ne peut s'accrocher à rienen cette vie, que tous ces succédanés ne sont que vanité éphémères. Si la sortie du nénat ne réside pas dans l'ordre de la matière, dans la satisfaction effrénée de nos convoitises, serait-elle alors à chercher dans les choses de l'esprit ? Cette noblesse qui nous vient de la pensée serait-elle l'échappée au non-sens qui, de toute part, nous étreint ?" p.43-45

"A l'université d'Istambul j'entrai en contact avec les mondes musulman et juif. J'eus des professeurs d'une valeur hors-pair, aussi bien intellectuelle que religieuse et morale. Pour M. Feyzi, le Prophète, c'était Mahomet ; pour M. auerbach, c'était Moïse ; et pour moi, c'était Jésus. Quid est Veritas ?, qu'est-ce que la Vérité (avec majuscule !). Oui, où est-elle, la Vérité absolue ? Cette question retentit en moi comme un éclair. [...] Toute ma vie était-elle bâtie sur une illusion ? Me voilà bien ! J'étais "embarquée", selon le terme pascalien, sur une voie qui désormais me semblait incertaine. Que faire, où aller, quel chemin prendre ? Je me trouvais soudain plongée dans un tunnel obscur et sans issue. Ainsi ai-je été longtemps déchirée entre mon coeur, toujours attaché à la foi, et mon esprit, qui en réclamait des preuves. Affectivement, je disais oui à dieu, rationnellement je lui disais non. Or je suis absolue, je ne peux pas rester à la porte. Je voulais casser cette porte et trouver Dieu par mon propre raisonnement. J'appliquais à moi-même cette maxime de Marc Aurèle souvent répétée à mes élèves : "L'obstacle est matière à action." Elle devait bien se trouver quelque part, la Vérité ! [...] je cherchais un système sûr, un outil prpre à la découverte. Ah bien oui ! Quelle déconvenue. Je constatais que chaque "grand" philosopheprétend à un discours meilleur que celui de ses prédécesseurs, discours qui sera à son tour controversé. [...] Je restai sur ma faim. Qu'à cela ne tienne, il fallait chercher ailleurs. Je me lançai dans l'étude de toutes le sreligions, à la poursuite de celle qui m'apporterait des preuves irrécusables. [...] Je jetai un regard désabusé sur les cahiers où j'avais accumulétant de notes sur les philosophies et les religions avec un naïf espor. Que de temps perdu ! [...] Finalement, j'en arrivai à la conclusion désespérante que la raison ratiocinante ne pouvait rien m'apporter. Plus tard je comprendrai combien cette étude m'avait enrichie. Ce n'était pas la recherche qui péchait, elle est bonne en elle-même. Il y a dans l'homme une tension légitime vers la vérité. Mais c'est l'objectif assigné à ma recherche quiu contenait sa propre impasse : vouloir comprendre Dieu, dans le sens latin du mot comprehendere, "saisir le tout". Je voulais en effet prendre possession de Dieu lui-même, le maîtriser. Quel orgueil ! [...] Je m'imaginais capable, à l'égal de Dieu, d'atteindre à la connaissance absolue." p. 54-57

"Cette période de doute qui s'étendit sur des années fut certes lourde à porter. Mais elle m'a aidée à devenir davantage une soeur universelle. Comme je les comprends, ceux qui doutent, ceux qui refusent de croire, ceux qui cherchent vainement. Ils sont comme une partie de moi-même. [...] Le Dieu vivant qui se révèle à l'homme vivant ne se trouve ni à force de raisonnement ni au bout d'une lorgnette. Croyant ou non croyant, il faut se méfier d'un pur intellectualisme, évasion du réel et de l'action. Croyant ou non croyant, il faut s méfier de l'impérialisme de la raison. Livrée à sa seule puissance, la raison se croit capable de tout, de tout embraser, de tout maîtriser. Ce qui m'a sauvée, c'est de me heurter aux limites de la raison et de, finalement, y consentir." p. 59-60

"Grandeur et misère que l'aventure dans l'ordre de l'esprit ! Elle semble porteuse de promesses infinies, mais débouche sur le constat de l'impuissance. Alors tout notre fondement craque, et la terre s'ouvre jusqu'aux abîmes. Recherchant sa propre transcendance, en quelque domaine que ce soit, l'homme découvre un jour sa faiblesse ontologique. Comme Adam et Eve, ses yeux viennent à s'ouvrir, mais c'est pour découvrir qu'il est nu. La faiblesse essentielle, elle est dans la peau, tu ne peux pas en sortir et n'en sortiras jamais, jusqu'à la mort. [...] Ecartelé entre l'infiniment grand et l'infiniment petit, crucifié entre la puissance, la noblesse de sa raison et l'expérience de ses limites, affronté au vide en lui-même et à la béance inéluctable de la tombe, l'homme, "coeur creux et plein d'ordure", est alors tenté de fuir, de fuir en avant." p. 63-64

6 octobre 2009

L'Elégance du hérisson

Extraits du roman de Muriel BARBERY, L'Elégance du hérisson éd. Folio (Gallimard)

1024396_gf"Je suis veuve, petite, laide, grassouillette, j'ai des oignons aux pieds et, à en croire certains matins auto-incommodants, une haleine de mammouth." p.15

"Tandis que, garante de ma clandestintié, la télévision de la loge beuglait sans que je l'entende des insanités pour cerveaux de praires, je me pâmais, les larmes aux yeux, devant les miracles de l'Art." p.18

"Apparemment, de temps en temps, les adultes prennent le temps de s'asseoir et de contempler le désastre qu'est leur vie. Alors ils se lamentent sans comprendre et, comme des mouches qui se cognent toujours à la même vitre, ils s'agitent, ils souffrent, ils dépérissent, ils dépriment et ils s'interrogent sur l'engrenage qui les a conduits là où ils ne voulaient pas aller." p19

"Les gens croient poursuivre les étoiles et ils finissent comme les poissons rouges dans un bocal." p.20

"Mais ce qui est certain, c'est que dans le bocal, je n'irai pas. C'est une décision bien réfléchie. Même pour une personne aussi intelligente que moi, aussi douée pour les études, aussi différente des autres et aussi supérieure à la plupart, la vie est déjà toute tracée et c'est triste à pleurer : personne ne semble avoir songé au fait que si l'existence est absurde, y réussir brillamment n'a pas plus de valeur qu'y échouer. C'est seulement plus confortable. Et encore : je crois que la lucidité rend le succès amer alors que la médiocrité espère toujours quelquechose." p.22

"[...] Manuela a peaufiné au Coton-Tige des chiottes dorées à la feuille qui, en dépit de cela, sont aussi malpropres et puantes que tous les gogues du monde parce que s'il est bien une chose que les riches partagent à leur corps défendant avec les pauvres, ce sont des intestins nauséabonds qui finissent toujours par se débarrasser quelque part de ce qui les empuantit. Aussi peut-on tirer une révérance à Manuela. Quoi que sacrifiée sur l'autel d'un monde où les tâches ingrates sont réservées à certains tandis que d'autres pincent le nez sans rien faire, elle n'en démord pour autant pas d'une inclination au raffinement qui surpasse de loin toutes les dorures à la feuille, à forfiori sanitaires." p. 29-30

Manuela "extirpe de son vieux cabas une petite bourriche de bois clair dont dépassent des volutes de papier de soie carmin et, nichées dans cet écrin, des tuiles aux amandes. Je prépare un café que nous ne boirons pas mais des effluves duquel nous raffolons toutes deux et nous sirotons en silence une tasse de thé vert en grignotant nos tuiles." p.30

"[...] vulgarité des employeurs dont tout l'argent ne sait masquer la vilenie et qui s'adressent à elle comme à un chien croûtant de pelades." p.31

"-Marx ? interroge-t-elle en prononçant le"x" comme un "ch", un "ch" un peu mouillé qui a le charme des ciels clairs." p.31

"-J'y comprends rien, m'a dit Manuela pour qui un bon rôti est un bon rôti et c'est tout." p.33

"Cet après-midi, M.Arthens porte une grande lavallière à poids qui flotte autour de son cou de patricien et ne lui sied pas du tout parce que l'abondance de sa chevelure léonine et la bouffance éthérée de la pièce de soie figurent à elles deux une sorte de tutu vaporeux où se perd la virilité dont à l'accoutumée, l'homme se pare." p. 34

"Renée. Il s'agissait de moi. Pour la première fois, quelqu'un s'adressait à moi en disant mon prénom. Là où mes parents usaient du geste ou du grondement, une femme, dont je considérais à présent les yeux clairs et la bouche souriante, se frayait un chemin vers mon coeur et, prononçant mon nom, entrait avec moi dans une proximité dont je n'avais pas idée jusqu'alors. Je regardai autour de moi un monde qui, subitement, s'était paré de couleurs. En un éclair douloureux, je perçus la pluie qui tombait au-dehors, les fenêtres lavées d'eau, l'odeur des vêtements mouillés, l'étroitesse du couloir, mince boyau où vibrait l'assemblée des enfants, la patine des portemanteaux aux boutons de cuivre où s'entassaient les pèlerines de mauvais drap - et la hauteur des plafonds, à la mesure du ciel pour un regard d'enfant. Alors, mes mornes yeux rivés sur les siens, je m'agrippai à la femme qui veait de me faire naître." p.46

6 octobre 2009

BIENVENUE

Bonjour

Bienvenue sur mon blog dédié à mes lectures ! Mais pas seulement !... ;)

Bonne promenade !

Nina

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Petite Bulle Littéraire
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